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Fin de vie : on en parle dans vos hôpitaux

 

La loi Leonetti permet à toute personne majeure de rédiger des consignes sur sa fin de vie pour le jour où elle ne serait plus en mesure de les exprimer. Un document écrit, daté et signé que l’on appelle « les directives anticipées ». Depuis avril, les hôpitaux de Roubaix, Tourcoing et Wattrelos, en lien avec l’Assurance Maladie, en font la promotion. Les patients sont-ils réceptifs ? L’affaire Vincent Lambert – tétraplégique maintenu en vie par décision de justice – a-t-elle incité le public à s’y intéresser ? «  On en parle un peu plus, remarque le docteur Heuclin, chef du service des soins palliatifs de l’hôpital de Roubaix. La médiatisation de certaines affaires aide à libérer la parole.  »

 

Pour autant, seuls 2,5 % des patients en fin de vie avaient rédigé leurs directives anticipées selon une étude de l’Institut national démographique (INED) qui date de 2012. S’interroger sur ses souhaits en matière de limitation de traitement n’est pas forcément facile. «  Cette information demande à être intégrée par les familles, explique le docteur Heuclin. Aussi, il y a des malades qui ont peur qu’on ne tente rien pour les sauver. C’est notre rôle de les rassurer.  »

 

Depuis la promulgation de la loi, il n’y a pas eu de grande campagne de communication à ce sujet. C’est chose faite avec celle lancée par les hôpitaux du versant nord-est. «  Nous n’avons pas tapissé le hall de l’hôpital d’affiches. C’est un sujet que l’on aborde dans certaines circonstances, lorsque le malade a un pronostic très défavorable, lorsqu’il est atteint d’une maladie incurable par exemple  », indique Laurent Guignon, directeur adjoint du CH Dron à Tourcoing. Ne vous attendez pas à ce que l’on vous pose cette question pour une banale opération de l’appendicite.

 

«  Dans tous les cas, il faut qu’il y ait une relation de confiance entre les deux.  », ajoute le docteur Guillaume Bouquet, de l’unité de soins palliatifs de Tourcoing. Dans son service, le médecin n’a pas été assailli de questions sur ce formulaire, valable trois ans. En revanche, «  on m’interroge sur l’euthanasie et le suicide médicalement assisté.  »

 

« Il n’y aurait pas eu d’affaire Lambert »

 

Communiquer ses dernières volontés à ses proches permet de lever toute ambiguïté. «  Il n’y aurait sans doute pas eu d’affaire Lambert si ce dernier avait écrit ses directives, avant son accident. Ça permet d’éviter un conflit familial et de diminuer la culpabilité des proches qui devraient prendre une décision. » Dans la famille de Vincent Lambert, pour mémoire, l’épouse, le neveu et une sœur du patient sont pour l’arrêt des traitements alors que les parents du jeune homme et une partie de la fratrie s’y refusent radicalement. «  En cas de directives écrites, l’avis du patient prime sur celui de la famille et tout autre avis non médical  », affirme le docteur Bouquet.

 

Chaque année, 5 000 patients, en fin de vie, seraient dans l’incapacité de communiquer. «  Nous sommes tous potentiellement concernés, estime Laurent Guignon. Demain, on peut se retrouver dans un état végétatif après avoir été victime d’un accident de voiture ou de moto…  »

 

 

 

«Dans ma carrière, j’ai vu plus d’un patient changer d’avis»

Pourquoi faut-il rédiger ses directives anticipées ? « Je vais prendre le problème à l’envers. En tant que médecin, je ne suis pas emballé par les directives anticipées. C’est quelque chose de trop figé. Dans ma longue carrière, j’ai vu plus d’un patient changer d’avis. Un exemple : lorsque j’étais interne en réanimation au centre hospitalier de Tourcoing, j’ai rencontré un monsieur qui avait avalé un produit toxique. Il avait inscrit dans ses directives anticipées qu’il ne voulait pas être réanimé. Sur son lit d’hôpital, il m’a confié qu’il regrettait ses écrits. Et ce n’est pas un cas isolé. »

Qu’est-ce qui vous inquiète ? « J’ai peur que ces directives deviennent trop officielles, qu’elles soient imposées aux médecins. Il faut laisser la possibilité au corps médical de dire oui ou non. »

Certains de vos patients vous ont-ils demandé de les aider à rédiger leurs directives ? « Non, jamais, mais il arrive que des patients me confient leurs souhaits par écrit. Je ne suis pas favorable à un texte déposé, en revanche il est important de dialoguer avec ses proches et son médecin traitant. »

Le docteur Bonnemaison, jugé pour avoir abrégé la vie de sept de ses patients, a été acquitté cette semaine. Que pensez-vous de cette décision ? « Elle rend les choses très compliquées. Même si on peut moralement justifier sa décision, il n’a pas respecté la loi... et il a été acquitté.

Personnellement, je me vois difficilement agir comme lui dans les mêmes circonstances. Je ne veux pas qu’on m’oblige à le faire. Le médecin doit pouvoir garder son libre-arbitre. »

 

 

 

Nord Eclair

 

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