« Le cancer est de temps en temps une pathologie grave qui mènera à une fin de vie. » Pour le docteur Aurélien Carnot, tout est dans le « de temps en temps » et si le service d’oncologie est voisin de celui des soins palliatifs, c’est à la fois lourd et utile. Lourd pour les patients mais utile pour les personnels soignants.
Parmi les évolutions médicales autour du cancer, il y a eu la mise en place des réunions de concertation pluridisciplinaires (public et privé) qui regroupent des oncologues, des radiologues, des chirurgiens, des pneumologues, etc. le tout afin de prendre la meilleure décision pour le patient. Et puis, il y a les soins de support avec prise en charge diététique pour éviter les pertes de poids, l’assistante sociale intervient aussi. « C’est particulièrement utile dans un bassin de vie où il y a de grosses difficultés financières, la maladie vient tout chambouler. Il faut monter des dossiers, trouver un logement souvent. »
Deux psychologues pour un temps plein interviennent régulièrement, une psycho esthéticienne aussi. « Tous ces soins-là ne sont pas uniquement pour chouchouter le patient, mais bien pour essayer de lui faire accepter la maladie. De fait, ils ne viennent plus à reculons aux séances, ils ont moins de nausées. » ajoute le docteur Carnot.
En oncologie, on insiste maintenant sur l’importance de la pratique sportive. « Oh, pas pour courir un marathon. L’exercice favorise la tolérance au traitement et son efficacité. C’est toujours un pas de plus vers la guérison, vers le mieux vivre. » Ces exercices peuvent se pratiquer à l’hôpital ne serait-ce que par des marches en parcours dans les extérieurs. En septembre, des séances de yoga vont être mises en place. Il y a aussi les séances d’art-thérapie avec le MUba ou les interventions de musiciens dans ce service.
Des recherches cliniques
Même si le service de Tourcoing n’est pas dans un centre universitaire, depuis deux ans, il participe à des recherches cliniques en lien avec le CHU d’Amiens. « Le but est bien la compréhension de la maladie pour la combattre. » Il s’agit d’adapter les stratégies de traitement, trouver les petites différences pour améliorer les résultats et le bien-être des patients. « Un gros effort a été porté sur les effets secondaires des traitements, qu’ils soient moins invasifs. » Les essais cliniques ont, par exemple, permis de retirer un produit de protocole qui ne servait à rien et avait des effets secondaires !
La recherche et le travail des médecins doivent avoir pour but de rendre la maladie silencieuse à terme pour le patient, estime le docteur Carnot.<cci:mvdn_puce class="macro" displayname="MVDN_PUCE" name="MVDN_PUCE">
À Tourcoing, on ne traite pas les tumeurs rares, ni les cancers pédiatriques, cela se passe à Lille.
Oncologie: «Un service où l’on sent vraiment que la vie est précieuse»
Les soignants sont aussi formés à la consultation d’annonce qui a lieu avec un médecin car on ne peut pas annoncer au patient qu’il souffre d’un cancer n’importe comment, il y a un côté psychologique important. « Il peut encore y avoir des annonces maladroites… »
« Avant, le patient était dans le subir, il est passé au stade acteur dans son traitement. » avec la prise en charge plus globale. « Le patient est de nouveau acteur de sa santé. »
Le lien avec les soignants est plus fort : « il faut savoir faire tomber la blouse (…) C’est un service où on a plus qu’ailleurs le sentiment que la vie est précieuse, de sa fragilité et de l’importance de la relation aux autres. Ici tout devient sincère. On n’a pas le choix de revenir à l’essentiel. » « Les patients, on les connaît tous bien, on les suit pendant des mois . »
Les actions culturelles menées dans le service sont aussi pour elles un moyen de « casser les murs de l’hôpital (…) On sort avec les patients ; on en a même emmené voir un match du LOSC ». Il y a aussi l’axe sport et cancer avec des associations qui permettent de lancer des actions. Cela se fait en partenariat avec celles qui interviennent en soins palliatifs. « Le programme sportif est validé par les médecins selon le niveau des patients. Beaucoup d’entre eux reprennent une activité sportive ce qui diminue considérablement les risques de récidive. »
Le service est normé donc ne peut pas être en sous-effectif. Il existe aussi des groupes de parole à destination des soignants. « Avant, on disait que le soignant devait laisser ses émotions au placard, mais c’est impossible. Il faut seulement savoir les gérer. Elles sont importantes. » <cci:mvdn_puce class="macro" displayname="MVDN_PUCE" name="MVDN_PUCE">
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«Ici on se déshabille un peu devant les autres»
Richard et Norbert sont installés dans la salle aux quatre fauteuils. Ce jour-là, ils ne sont que deux pour une séance de chimiothérapie. Et on se prend une belle claque de bonne humeur ! « Quand on m’a annoncé le cancer, sérieusement je n’en avais rien à faire, c’était le troisième. Je me suis déjà débarrassé des deux premiers, alors ! », balance Richard dans un grand rire.
Pour Norbert, l’annonce a été plus (trop) brutale. « Je l’ai appris tout seul en recevant le courrier à la suite d’une IRM, c’est dur à accepter. » Norbert lit beaucoup, un tempérament beaucoup plus réservé que son voisin de la journée, mais il rigole avec bon cœur à ses blagues.
« J’ai un tempérament zen, ça aide à voir les choses avec plus de sérénité. Je me faisais tout un état de la chimio, mais ici ça va, les gens sont gentils et compétents On vit déjà avec la maladie, on ne va pas en faire un fardeau en plus. » « Ça dépend des traitements », lui répond Richard.
Lui est « content » de venir. « Ici, il y du monde ; moi je vis seul, ils sont aux petits soins. » « Mumu », l’aide-soignante à l’énergie communicative, est là, apporte gâteaux, café.
Un personnel aux petits soins
Même si les infirmières et les patients ont tendance à s’appeler par leurs prénoms, chacun respecte la manière d’être des autres. « La maladie permet aussi de découvrir des gens, de ne pas être seul. Ici on se déshabille un peu devant les autres… On laisse tomber nos réserves. » Et Richard d’ajouter : « ici on discute de tout, c’est open-bar ! » Le personnel est très attentif. « Avec le traitement, il y a un patient qui ne supporte pas le patchouli alors quand je sais qu’il vient pour une séance je n’en mets pas… », explique Mumu. « D’autres n’aiment plus les odeurs de cuisine, donc on fait attention à l’heure de repas. » Passionné de jazz, Norbert a aussi décidé de se mettre au taï-chi, « il est important de rester positif ».
D’autres patients ont des traitements plus lourds ou veulent la solitude. Ils sont dans des chambres individuelles.